Position amarrés au ponton de la marina de Santiago : 19°58.97’N 75°52.38’W
Le taxi réservé par le dockmaster est un taxi officiel, carrosserie jaune avec bas de caisse à damier noir et jaune, toit blanc (autorisé à transporter des touristes), plaque d’immatriculation comportant un rectangle bleu avec l’indication « Cuba », immatriculation en noir sur fond blanc : le chauffeur précise tout ça car les contrefaçons sont fréquentes, qui ne peuvent réunir toutes ces caractéristiques sauf à s’exposer à des amendes sévères, voire à la perte de leur emploi : Beaucoup sont fonctionnaires et touchent un chômage minimal, mais précieux. Le taxi d’état se fait néanmoins payer en dollars, un tarif qu’il vaut mieux négocier à l’avance, et comme la ville est à 10 Km, il faut réfléchir au nombre d’aller et retours. Les dollars représentent la monnaie qui permet d’acheter des objets étrangers : machine à laver, smartphone, pièces de moteur…
Première préoccupation : trouver une banque pour prendre des pesos avec les cartes bleues. Le chauffeur pilote calmement dans le dédale des rues de Santiago, une ville très étendue, et sait ou trouver une agence ou la queue n’est pas trop longue, ce qui n’est clairement pas le cas dans le centre historique, à la banque centrale. Un petit agent de change installé près d’un grand hôtel méridien quasi vide peut fournir les pesos, mais pas le sourire. Deuxième préoccupation: se procurer des cartes permettant de se connecter au réseau wifi ETECSA. Ces cartes donnent en principe droit à 1 heure de connection, ce qui ne signifie pas 1 heure de communication. Le temps que se télécharge l’information convoitée ou la photo qu’on envoie, ou que sonne un téléphone avant que l’interlocuteur ne décroche, est compté, et le réseau est instable. Ces cartes sont vendues à un tarif imposé, mais pour les obtenir il faut faire la queue, entrer 1 par 1, donner son passepo
rt, et le fonctionnaire tape sur un clavier d’ordinateur les infos de chaque client, et ça va doucement au rythme du réseau internet … qui bloque de temps en temps. Un dame sort alors sur le trottoir, annonce au public que le réseau est en panne. On attend. Ca repart. La porte s’entrouve: « Au suivant! ». Des gens continuent d’arriver en demandant « Ultimo? » : quel est le dernier avant eux? car l’avant dernier est probablement assis quelquepart sur un banc à surveiller celui qu’il suivait et ne revient s’inserer dans la file que quand sont tour approche. Manu et Claude ont attendu stoïquement pendant 2 heures 20, puis une panne s’est déclarée peu avant midi, juste avant la pause du déjeuner des fonctinnaires. Il restait un peu de temps pour circuler dans les alentours avant le rendez vous pris pour le retour avec le taxi. Une marche rapide dans les escaliers de la révolution permet de calmer un peu la frustration.
Les marchés au légumes réputés sont fermés, tous les étals vides. Quelques informations collectées dans la file, en espagnol et en français, langue pratiquée par nombre de personnes interressées par le contact avec cette population de voyageurs aux longs congés payés. On essaye d’entraîner le voyageur naïf dans une soit- disant coopérative ou on trouve des cigares et du rhum. Mensonge. Contrebande ou contrefaçon. Non
Un français échoué là avec une épouse cubaine donne l’explication de l’absence de légumes, ou même de toute denrée autre que de l’eau, de rhum, ou des couches pour bébé dans les magasins : toutes les villes sont bouclées, à cause du covid. Les paysans ne peuvent plus venir apporter leurs produits en camion. S’ils y parviennent, les vendre au marché au prix imposé et en payant des taxes est pour eux moins rentable que de les apporter en cariole à des gens qu’ils connaissent et qui vont les vendre derrière leur volets entrouverts. Pour le pain et les oeufs, tickets de rationnement. Pas de café. Les autochtones se débrouillent par troc, avec un réseau d’amis d’amis, ils survivent, les femmes restent coquettes, ils bavardent et rient, ralent quelquefois quand arrive midi et qu’ils savent qu’ils n’auront rien au bout de la queue qu’ils suivent depuis des heures. Les prix complètement dérégulés par l’obligatoire marché noir les appauvrissent encore, malgré
une petite augmentation des salaires en novembre quand le CUC a été abandonné et remplacé par les pesos.
Bredouilles. Complètement. Contents de rentrer au bateau, au refuge, protégés de la rapacité de ces gens aux abois par les guarda frontera qui veillent à ce que les touristes ne soient pas trop molestés, ne pas tuer la poule aux oeufs d’or.
Tout près de la marina, alors que Manu négocie avec un jeune homme qui habite là la lessive en machine de quelques draps contre un tube de dentifrice et du savon de toilette, un minuscule cariole passe attelée à un ane contraint à marcher à petits pas par un harnais trop court sur l’arrière des jambes. Une dame et un adolescent sont assis sur le banc, et dans la cariole, des légumes. Ils acceptent de céder 2 bottes d’oignons tout frais et 1 livre de beaux poivrons pour 130 pesos.
A la marina, le dockmaster du jour nous cède des cartes ETECSA pour le double de leur prix. Reste à trouver une antenne…
J’ai pu envoyer quelques photos pour le blog hier, sur la fin de la carte entamée à Cienfuegos. Et heureusement qu’avec l’Iridium du bord, il reste possible d’écrire et recevoir des messages écrits. L’usage du téléphone satellite est strictement interdit à Cuba, nous respectons les régles

